Enquêtes d’opinion et baromètres sociaux confirment une attente forte des salariés et des agents publics de réguler leur charge de travail. Les études convergent pour montrer que la moitié subit une charge excessive en permanence.
Pourquoi une telle plainte aujourd’hui ? Parce que le contexte de travail impose une charge mentale de plus en plus importante et qu’elle est difficile à saisir. On ressent de la fatigue, mais on ne sait pas comment s’en dépêtrer.
Ce n’est évidemment pas nouveau : on s’interrogeait sur le surmenage aux débuts de l’ère industrielle. Mais c’était avant la révolution numérique, qui impose de cohabiter avec une réalité virtuelle qui ignore notre rythme animal. Avant que le travail pour la plupart d’entre nous ne devienne invisible, sans bornes physiques et temporelles. Se représenter l’immatériel demande un effort cognitif.
Parallèlement, nous travaillons depuis une vingtaine d’années sous une pression croissante : faire plus en moins de temps. Peu d’activités sont épargnées par l’intensification. Peu de travailleurs échappent à la polyvalence : en plus de son métier, une cheffe de service hospitalier doit faire de la comptabilité, un livreur doit acheter et entretenir son vélo, une caissière doit inciter les clients à se fidéliser, un juriste doit savoir manipuler ses outils informatiques.
L’injonction permanente à se dépasser, à s’adapter et à être autonome est épuisante. Même les cadres ne sont pas épargnés, loin de là.
Une écoute du ressenti légitime
La question de la charge n’est pas une affaire de gestion, mais d’attention psychosociale, c’est-à-dire à la jonction de la personne et de l’organisation. Elle n’est plus seulement une recherche d’amélioration des conditions de travail physique et d’expertise ergonomique. Elle est une écoute du ressenti légitime de chacun dans un quotidien où travail et vie privée se mélangent sans pudeur.
Ce n’est pas pour rien que la loi (2016) impose depuis peu qu’elle soit « raisonnable » pour les travailleurs à distance et ceux au forfait en jours. C’est une affaire de santé et il n’est pas étonnant que les Assises du travail (2023) débouchent notamment sur la très bonne idée de placer l’écoute comme nouveau principe de prévention des risques professionnels.
Comment s’y prendre ? Sans définition légale, la charge est ce que le travail fait, demande mais aussi apporte au travailleur. L’analyser permet d’identifier les zones à risque de stress, mais aussi et surtout les points-appuis et la répartition pour bien travailler. Elle n’est pas négative en soi. Les actifs sous-employés et placardisés en savent quelque chose : il n’y a rien de pire que de ne pas être attendu sur ses compétences ou simplement ce pour quoi on a le goût de faire. Il n’y a pas de mesure objective, mais une évaluation subjective du sentiment de charge.
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