L’adolescente de 15 ans avait été poignardée et brûlée vive à Creil en 2019 par son ex petit ami, alors qu’elle était probablement enceinte de lui.
La cour d’assises des mineurs de l’Oise a condamné samedi 10 juin à 18 ans de réclusion criminelle l’ex-petit ami de Shaïna, pour l’assassinat de cette adolescente, poignardée et brûlée vive à 15 ans en 2019 à Creil, et probablement enceinte de lui. «Pourquoi ? Pourquoi ?», a réagi l’accusé, teint blême, barbe naissante et yeux sombres, à l’énoncé du verdict, dans la nuit de vendredi à samedi, après 4 heures de délibéré. Puis: «Vous avez tort ! Je suis innocent !» Le frère de Shaïna, Yasin, a fait un malaise peu après le verdict, à l’issue d’échanges tendus avec l’accusé, entraînant une suspension d’audience.
Cette peine, prononcée dans une ambiance lourde, est inférieure aux réquisitions de l’avocat général, Loïc Abrial, qui avait réclamé 30 ans de réclusion criminelle pour un crime selon lui «prémédité à chaque étape». Il avait demandé la levée de l’excuse de minorité de l’accusé, âgé de 17 ans au moment des faits, ce qui permet de porter la peine maximum de 20 à 30 ans, ont expliqué à l’AFP les avocats des deux parties. Mais celle-ci n’a pas été retenue par la cour.
L’avocate de l’accusé, Me Elise Arfi avait décrit, après les réquisitions, un homme «pétrifié, terrorisé», face à la demande d’une peine «plus longue que toute sa vie». Son second conseil, Me Adel Fares, a «plaidé l’acquittement». Tout au long du procès à huis clos, ouvert lundi, le jeune homme, un lycéen sans casier judiciaire au moment des faits, a crié son innocence. «Je veux juste être tranquille», a-t-il lancé aux jurés au moment de ses derniers mots, selon l’avocat général. Selon les parties civiles, l’expert psychiatre a pointé jeudi le manque d’empathie et le narcissisme du jeune homme, un portrait récusé par la défense.
«Comme une chose»
Shaïna, morte à 15 ans, avait été victime deux ans plus tôt dans sa cité d’agressions sexuelles, dont les images avaient été diffusées en ligne, l’exposant selon Me Negar Haeri, l’avocate de sa famille, à être traitée «comme une chose». Quatre autres jeunes hommes ont été condamnés le 1er juin en appel pour ces faits à des peines allant de six mois à deux ans de prison avec sursis. Selon l’enquête, Shaïna, décrite par sa mère comme «rigolote et souriante», entamait probablement une grossesse, qu’elle attribuait à l’accusé.
Ce dernier a pu être mu, selon les parties civiles, par la crainte de perdre l’amour de ses parents s’il rompait avec leurs exigences de perfection, sur fond d’interdit religieux autour de la sexualité. «Il était prêt à tout détruire pour sauver son image», a tranché l’avocat général vendredi. «Il n’y a pas de lien à faire entre la foi» de l’accusé et le crime jugé, a au contraire balayé Me Adel Fares.
«Toutes les violences de genre»
Les parents de Shaïna se sont eux révoltés, devant la cour, contre la réputation infligée à leur fille et le portrait esquissé par certains témoins. En deux ans, Shaïna «a vécu toutes les violences de genre», a pointé vendredi Me Zoé Royaux, porte-parole de la Fondation des femmes, partie civile. En France, selon les chiffres officiels, une femme meurt tous les trois jours de la violence de son conjoint ou ex-conjoint.
Les audiences ont été marquées par le revirement ou l’absence de certains témoins à charge. Un ami de l’accusé a affirmé ne plus se souvenir d’avoir vu du sang sur ses vêtements au lendemain des faits. Deux ex-codétenus, selon lesquels le jeune homme se serait vanté d’avoir tué pour ne pas endosser la paternité d’un «bâtard», ne se sont pas présentés. Pas de quoi affaiblir le dossier, pour Me Haeri, pour qui la culpabilité de l’accusé repose sur des éléments «super objectifs». Son portable et celui de Shaïna ont notamment «borné» peu avant les faits près du cabanon du crime, et des brûlures sur les jambes du jeune homme ont été confirmées par un expert médical.
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