Après un veto russe, le Conseil de sécurité de l’ONU a échoué, mardi 11 juillet, à prolonger le mécanisme d’aide humanitaire transfrontalier vers la Syrie, interrompant une voie de passage vitale pour des millions d’habitants de zones rebelles du pays.
Les quinze membres du Conseil tentaient depuis des jours de trouver un compromis pour prolonger ce mécanisme qui permet d’acheminer depuis la Turquie, en passant par le poste frontière de Bal Al-Hawa, sans autorisation de Damas, de la nourriture, de l’eau ou des médicaments aux habitants du nord-ouest de la Syrie.
Face aux besoins encore plus criants depuis les séismes de février, l’ONU, les humanitaires et une majorité de membres du Conseil réclamaient une prolongation d’au moins un an pour permettre notamment une meilleure organisation de l’aide.
Veto russe
Le texte initial, rédigé par la Suisse et le Brésil, chargés de ce dossier, proposait ainsi cette extension de douze mois. Face à l’opposition de la Russie, qui insistait pour seulement six mois comme c’était le cas actuellement, un compromis de neuf mois a été mis au vote mardi. Mais la Russie a mis son veto à cette résolution qui a recueilli treize voix pour et une abstention (Chine).
Le Conseil a également rejeté mardi par deux voix pour, trois contre et dix absentions, un texte concurrent présenté par la Russie qui proposait une prolongation de six mois, mais qui dénonçait les sanctions occidentales imposées à la Syrie.
« C’est un triste moment pour ce Conseil, sauf pour un pays », a lancé l’ambassadrice américaine après le veto russe, dénonçant un « acte de cruauté absolue ».
« Ce calendrier aurait permis de passer les durs mois d’hiver », a déploré, de son côté, l’ambassadrice suisse Pascale Baeriswyl, se disant « très déçue ». « Nous ne laisserons pas ce veto mettre un terme à nos efforts pour trouver une solution », a-t-elle assuré, précisant que son homologue brésilien et elle allaient « se remettre au travail immédiatement ».
Le secrétaire général de l’ONU, Antonio Guterres, est « déçu » par cet échec et a appelé « tous les membres du Conseil de sécurité à redoubler d’efforts pour soutenir la poursuite de la distribution d’aide transfrontalière », a déclaré son porte-parole, Stéphane Dujarric, précisant que l’ONU avait prépositionné de l’aide à l’intérieur du pays dans l’hypothèse d’un arrêt.
Intérêts du peuple syrien
L’ambassadeur russe, Vassili Nebenzia, a, lui, accusé les Occidentaux de « provocation pour pousser la Russie à utiliser son veto », estimant que le mécanisme « ne prend pas du tout en compte les intérêts du peuple syrien ».
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« L’aide humanitaire devrait être basée sur les besoins, pas la politique », a fustigé Floriane Borel, de Human Rights Watch, dénonçant le « veto cynique » de la Russie. L’ONU « devrait explorer immédiatement d’[autres] moyens (…) pour s’assurer que les Syriens reçoivent suffisamment de nourriture, de médicaments et [d’]autres aides dont ils ont désespérément besoin sans avoir à supplier la Russie ou le président syrien pour un accès », a-t-elle ajouté.
Le mécanisme créé en 2014 permet à l’ONU d’acheminer de l’aide humanitaire aux populations des zones rebelles du nord-ouest de la Syrie, sans autorisation du gouvernement syrien, qui dénonce régulièrement une violation de sa souveraineté.
Au départ, il prévoyait quatre points de passage, mais après des années de pression, en particulier de Moscou, allié du régime syrien, seul le poste de Bab Al-Hawa était resté opérationnel, et son autorisation avait été réduite à six mois renouvelables, compliquant la planification de l’aide humanitaire.
Deux autres points de passage opérationnels
Malgré l’expiration du mécanisme de l’ONU, au moins temporairement, deux autres points de passage sont opérationnels, même s’ils sont largement moins utilisés que Bab Al-Hawa. Le président syrien, Bachar al-Assad, avait en effet directement autorisé leur ouverture après les séismes de février, mais cette autorisation expire mi-août.
« J’ai grand espoir qu’ils continuent à être renouvelés, je ne vois pas de raison qui expliquerait que non », a commenté la semaine dernière le responsable de l’ONU pour les affaires humanitaires, Martin Griffiths, qui avait rencontré le président Assad à Damas fin juin.
Depuis les séismes du 6 février, plus de 3 700 camions d’aides de l’ONU ont traversé les trois points de passage, selon l’ONU. Mais la grande majorité sont passés par Bab Al-Hawa, dont 79 lundi.
Selon l’ONU, quatre millions de personnes dans le nord-ouest de la Syrie, la plupart des femmes et des enfants, ont besoin d’aide humanitaire pour survivre après des années de conflit, de chocs économiques, d’épidémies et de pauvreté grandissante aggravée par des séismes dévastateurs. Et le mécanisme qui a expiré lundi permettait de fournir de l’aide à 2,7 millions de personnes chaque mois.
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