Des chercheurs de l’Institut de recherche sur le cancer et le vieillissement de Nice travaillant sur le poisson-zèbre, une espèce qui vieillit de la même manière que les humains, ont fait une importante découverte. En allongeant la durée de vie des cellules de l’intestin de ce petit vertébré qui nous est similaire sur de nombreux aspects, ils sont parvenus à rajeunir tout son organisme de 40% ! Une prouesse qui confirme la thèse d’un imminent prix Nobel…
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Vivre plus longtemps n’est pas forcément désirable si l’on n’est pas en bonne santé. C’est pourquoi des chercheurs du CNRS au sein de l’Institut de recherche sur le cancer et le vieillissement de Nice s’attachent à comprendre les mécanismes du vieillissement. Le professeur Miguel Godinho Ferreira et ses équipes cherchent à savoir si retarder ce processus naturel est possible, sans pour autant augmenter les risques de cancers ou de maladies. Leur dernière découverte met un organe en particulier au cœur du déclin de la vie : l’intestin.
L’intestin, l’organe par lequel commencerait le vieillissement
Il y a plus d’un siècle, l’immunologiste russe de renom Elie Metchnikov, prix Nobel 1908, a constaté que le vieillissement découlait d’une inflammation accrue de l’intestin, due à l’infiltration de microbes dans la circulation sanguine. Plus nous vieillissons, moins le tube digestif joue son rôle de barrière et laisse ainsi passer certaines bactéries indésirables, ce qui entraîne un vieillissement plus rapide de l’organisme. Les travaux publiés ce 4 mai dans Nature Aging confortent cette théorie.
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« L’intestin est l’organe le plus exposé à l’extérieur : il est en contact avec les aliments, les micro-organismes présents dans notre environnement que nous ingérons, notre stress… », énumère Miguel Godinho Ferreira, le principal auteur de cette étude. « Bien sûr, il y a la peau aussi, mais à la surface, elle est morte. L’intestin, lui, est vivant, et tous les cinq jours, la plupart de ses cellules se renouvellent pour maintenir l’organe en bonne santé. C’est pour cela que petit à petit, il vieillit. » Ces nouvelles recherches suggèrent qu’en ralentissant le vieillissement de l’intestin, grâce à une méthode inédite, l’organisme tout entier s’en trouverait rajeunit. Du moins, chez le modèle animal que ces scientifiques ont utilisé, le poisson-zèbre.
« L’intestin, on en parle comme du deuxième cerveau, mais en réalité, c’est le premier cerveau, parce qu’au niveau de l’évolution, il est apparu avant. » – Mounir El Maï, chercheur sur le vieillissement
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Le poisson-zèbre, un vertébré étonnamment proche de nous
Ce poisson partage 70 % de ses gènes avec l’Homme, et en particulier les gènes liés aux maladies associées à l’âge et au cancer. Leur manière de vieillir est similaire à la nôtre. Ces scientifiques ont tout particulièrement travaillé sur leurs télomères. Il s’agit de l’extrémité des chromosomes, connue pour avoir un rôle dans le vieillissement. Plus nos cellules se divisent, et plus on vieillit, plus ces extrémités se raccourcissent. Il y a bien un moyen de les garder longues : la télomérase. C’est une enzyme que nous sécrétons naturellement jusqu’à notre naissance. En modifiant génétiquement ces poissons-zèbres, en injectant cette télomérase dans leur intestin, les chercheurs ont observé que le déclin de cet organe ralentissait. Sa paroi est restée étanche, a gardé sa fonction de barrière protectrice. Localement, la flore intestinale a également gardé sa variété, son équilibre. « Nos résultats montrent que retarder le vieillissement des cellules de l’intestin chez le poisson-zèbre permettait aussi de retarder la modification du microbiote intestinal. Celle-ci apparaît avec le vieillissement, et est impliquée dans différentes pathologies. C’est le cas aussi chez l’Homme », nous décrit Mounir El Maï, chercheur sur le vieillissement et le cancer qui a participé à l’étude.
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Augmenter la durée de vie en bonne santé de 40 %
Mais, plus surprenant : le vieillissement de tous les organes a ralenti ! L’organisme des vertébrés a gardé sa bonne condition de santé pendant plus longtemps, sans développer de cancer, et en restant fertile (pour les mâles) plus tard. Ce qui n’avait jamais été observé auparavant. « La lutte contre le vieillissement intestinal retarde non seulement le vieillissement des organes distants, mais elle est suffisante pour prolonger la durée de vie des poissons mutants de 40 %« , indique l’étude.
« Il faut visualiser un jeu de dominos, ajoute Miguel Godinho Ferreira. Est-ce que si l’on en fait tomber un, tout le reste tombe aussi ? C’était notre hypothèse, et c’est ce qu’il s’est produit. Ce qui est le plus spectaculaire, c’est que grâce à cette télomérase injectée dans l’intestin, des animaux stériles sont redevenus fertiles. » Alors que l’idée du vieillissement du corps pouvait apparaître comme un tout, une situation globale, commune à chaque organe, cette étude indique autre chose. « Concernant le vieillissement, il y a une hiérarchie dans les organes. Et si on la trouve, on peut inverser le processus », affirme son principal auteur.
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Dans une certaine mesure, le pouvoir régénérateur de jeunesse qu’a eu l’intestin chez le poisson-zèbre pourrait-il être transposé à l’Homme ? « L’intestin, on en parle comme du deuxième cerveau, mais en réalité, c’est le premier cerveau, parce qu’au niveau de l’évolution, il est apparu avant », nous indique encore le chercheur Mounir El Maï. « Montrer que le vieillissement de tout l’organisme pouvait être initié par l’intestin est très intéressant qui pourrait apporter de nouvelles découvertes thérapeutiques et diagnostiques. » Car les télomères ont aussi sûrement un rôle à jouer sur le cancer et d’autres maladies immunitaires ou gastro-intestinales. La prochaine étape de ses recherches consistera à comprendre la façon dont tous ces organes communiquent entre eux leurs signes de vieillissement.
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