Toulouse-Paris en Intercités, une aventure ferroviaire, une leçon de géographie sur rails!

Toulouse Paris en Intercités, une aventure ferroviaire, une leçon de géographie sur rails!
Toulouse Paris en Intercités, une aventure ferroviaire, une leçon de géographie sur rails!

L’Intercités en gare d’Argenton-sur-Creuse, un soir d’août 19.

Après Caussade, ça commence à tourner, pencher, grincer. Jusque-là, le train filait tout droit, à vitesse constante, ne ralentissant qu’avant les gares, dans un sifflement haletant mais efficace: Montauban, Caussade. Mais une fois quittée la cité du chapeau (marché le lundi), les choses sérieuses commencent. Le Toulouse-Paris monte à l’assaut du Massif central.

Le « bazar génois », que tenaient les parents de Léon Gambetta, à Cahors.

Ville natale de Gambetta. En quittant la plaine, le convoi tournoie, croise l’autoroute A20 dans un virage, une fois dessus, une fois dessous. Et bientôt, voici les robustes piliers de la gare de Cahors, douce cité lovée dans une boucle du Lot qui vit naître Léon Gambetta. Une atmosphère de tranquillité rad-soc pénètre jusque dans les compartiments.

Juste avant la petite préfecture du Lot, le train avait longé une enfilade de bâtiments métalliques qui signale, en France, la moindre ville. D’ordinaire, le voyageur ferroviaire voit moins de zones commerciales que l’automobiliste, car elles sont disposées le long des routes davantage que le long des voies ferrées. Cahors est donc une exception, qui s’explique par les abruptes collines plongeant dans le Lot, moins propices aux assauts de la grande distribution.

Le train arrive à Argenton, dans le sens sud-nord. Février 22.

On peine à se tenir debout. Après quelques kilomètres au bord de la rivière, les vertes collines, les causses arides, les bosquets d’arbres, les maisons en pierre chauffant au soleil et les petites routes désertes, forment un paysage idyllique, et la voie ferrée s’y perd en montées et en virages. Dans le train, on peine à se tenir debout, on se raccroche aux dossiers des fauteuils, on progresse lentement au milieu des bagages, en essayant de n’écraser aucun pied, de ne tomber sur aucun dormeur. Les gens sont là pour quelques heures, alors ils prennent leurs aises.

Le marché de Caussade (Tarn-et-Garonne), juillet 23.

Une gare toutes les 45 minutes. Le train Intercités Toulouse-Paris,  appelé « Le Capitole » entre 1960 et les années 1990, est une aventure ferroviaire, un voyage en soi. En 713 kilomètres et un peu moins de sept heures, des rives de la Garonne à celles de la Seine, le long serpent métallique passe le Tarn, l’Aveyron, la Dordogne, la Vézère, la Gartempe, la Creuse, l’Indre, la Loire et enfin l’Orge, s’arrêtant dans une bonne dizaine de gares, une tous les trois-quart d’heure en moyenne.

Pour qui veut se donner la peine de regarder par la fenêtre, le parcours tortueux est une découverte permanente, entre causses et vallons, bocages et troupeaux, toits d’ardoises et de tuiles, préfectures et sous-préfectures. Commencé en milieu d’après-midi, sous le soleil écrasant du midi toulousain, le voyage s’achèvera dans la tiède nuit parisienne. Dans l’autre sens, on quitte Paris à la fraîche, pour rejoindre Toulouse à l’heure de la sieste.

A Souillac (Lot), le patron de l’Occit’ami assure avoir déjà fait payer davantage des clients impolis. Juillet 23.

Quitter le sud à Souillac. Bordant la Dordogne, voici Souillac (marché le vendredi). A peine le temps d’apercevoir la silhouette rebondie de l’église abbatiale et s’impose déjà la courbe harmonieuse du viaduc de la Borrèze et ses 30 arches en pierre, classé aux monuments historiques. C’est ici, je le décrète, que l’on quitte le sud. Les demeures en pierres blanches cèdent la place aux maisons en granit, la terre rocailleuse aux grandes forêts, les piscines ouvertes aux piscines couvertes. Ca tourne encore et on s’endort, bercé par les crissements et les soubresauts.

Ce train, qui court à la fois très vite et très lentement sur une ligne de vie achevée en 1893, n’est jamais vide. L’autre jour, on y croisait même le chanteur Sanseverino, en route pour une tournée à Cahors et Toulouse. D’autres fois, pressé, j’avais certes pris à Montparnasse le TGV pour Matabiau, mais il est si plaisant de revenir au « Capitole ». Les lignes à grande vitesse proposent des déplacements aseptisés à côté de cette traversée épique, de ce cours de géographie sur rails.

Brive, la gare, vue de l’hôtel d’en face. Août 21.

« Ville à taille humaine ». Brive-la-Gaillarde, quel nom rigolo, n’est-ce-pas, au point que Brassens y situa une de ses chansons. Mais à l’échelle du Limousin, Brive, 47000 habitants, est une grande ville, une capitale économique, un pôle de correspondances, vers Aurillac ou Villefranche-de-Rouergue. La Corrèze, eldorado post-covid des citadins en peine de « ville à taille humaine », n’est plus le coin perdu qui élisait Hollande (sans même parler de Chirac ou de Queuille).

La partie la plus dure du Massif central est à venir. Voici les rives de la sombre Vézère, dans laquelle se reflètent des forêts denses. D’Uzerche (marché des producteurs le vendredi soir, en été), cité de pierres aux châteaux vertigineux, on n’apercevra que quelques solides maisons. Il reste plus de trois heures avant Austerlitz et c’est ici que la ligne atteint son point culminant, 447 mètres, « dans une zone de roches très dures », observait le géologue Philippe Duchemin en 1945. En passant la Vienne, l’arrivée à Limoges (marché tous les jours, sauf le lundi), la grande ville du parcours, est grandiose. Même d’en-dessous, la célèbre gare des Bénédictins offre une vue imprenable. Pour lui rendre hommage, le train s’arrête un peu plus longtemps qu’ailleurs, 3 minutes à peine.

Uzerche (Corrèze), au bord de la Vézère, mai 21.

Les sauveurs de trains. Alors que les rayons du soleil se font obliques, les paysages prennent maintenant une teinte vert foncé, parsemé de tâches brunes: les vaches limousines. Le bocage règne encore jusqu’à Argenton-sur-Creuse (marché le samedi), que l’on reconnaît à sa chapelle dominant un méandre. Il y a quelques années, les usagers de cette sous-préfecture de l’Indre avaient obtenu, grâce à de tenaces manifestations, un arrêt supplémentaire du train de Paris. Argenton marque une frontière invisible. Désormais, le convoi reprend de la vitesse, fonce dans la plaine berrichonne, s’arrête à peine à Châteauroux, passe Issoudun dans un souffle, traverse l’Yerres et le Cher et atteint Vierzon (marché le samedi), centre cheminot du pays, point de rencontre entre les lignes reliant Paris à Toulouse et Nantes à Lyon.

L’odeur de l’herbe coupée. Le soir tombe sur la Sologne et ses villages en briques rouges, sa forêt majestueuse, mais aussi ses champs de panneaux photovoltaïques, bien plus rentables, comme l’explique la Confédération paysanne, que la culture des céréales ou du chêne. Dans le train, on joue à se placer entre deux voitures, sur ce pont métallique instable qui les relie comme dans un jeu d’enfant, cette position bruyante et potentiellement anxiogène, pour respirer, les soirs d’été, l’odeur de l’herbe coupée qui parvient des tréfonds de la campagne.

Le train en gare de Châteauroux, août 19.

Les couronnes d’Orléans. Le train ralentit une avant-dernière fois, juste avant le pont sur la Loire, d’où l’on aperçoit les couronnes de la cathédrale d’Orléans (marché le samedi sur le quai du Roi, juste en-dessous de la voie de chemin de fer). Le fleuve n’est jamais le même. Les bancs de sable immaculés en été laissent la place à de sourds tourbillons avec les pluies d’automne. Le train s’arrête encore aux Aubrais, la deuxième gare d’Orléans, puis on distingue, dans le crépuscule, Artenay et son usine chimique, l’interminable portant en béton promis dans les années 1970 au monorail et sur lequel s’affichent de nos jours des slogans réacs, les silos de la Beauce.

Il faut désormais placer la tête contre la vitre et l’entourer de ses mains pour deviner le paysage dans la nuit. Les lumières d’Étampes, puis celles de la grande couronne et de la petite couronne, passent vite, alors que le train fonce, toujours déterminé, vers la gare d’Austerlitz. La porte s’ouvre enfin, descente sur le quai: il est 23 heures 23, « l’heure d’arrivée  prévue », annonce la contrôleuse. 7 heures de trajet et pas une minute de retard.

La gare de Limoges, novembre 14.

Retards fréquents. Alors, c’est vrai, ce trajet en Intercités n’est pas toujours aussi efficace. Les habitués pointent les retards fréquents, et je me souviens de moutons sur les voies dans l’Essonne qui avaient retardé l’arrivée d’une bonne heure, ou d’une attente de trois-quarts d’heure à Argenton, sans que personne, à la SNCF, n’ait pris soin de livrer la moindre explication aux voyageurs. Le PDG du groupe industriel Legrand, seule valeur du CAC 40, avec Michelin, dont le siège n’est pas en région parisienne, a même menacé de quitter Limoges si la liaison avec Paris continuait à se dégrader.

Mais justement, le Massif central a besoin de cette ligne. Elle est magnifique, elle présente des atouts qu’il serait dommage de ne pas valoriser. On ne donne pas envie de prendre le train en ne parlant que des retards!

Olivier Razemon (l’actu sur Twitter et sur Mastodon, des nouvelles du blog sur Facebook et de surprenants pictogrammes sur Instagram).

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