Ni dette, ni impôts. Pour l’exécutif, la lutte contre le réchauffement climatique devra se passer de ces deux outils de financement traditionnellement utilisés par la France face aux crises. Mardi 23 mai, au lendemain de la publication du rapport de l’économiste Jean Pisani-Ferry sur le financement de la lutte contre le réchauffement climatique, plusieurs membres du gouvernement se sont relayés sur les antennes pour défendre la ligne tenue depuis 2017 par Emmanuel Macron.
Le rapport remis par l’économiste à la première ministre Elisabeth Borne estime les besoins en financement public et privé à près de 70 milliards d’euros par an, pour faire face à la crise climatique et réduire les émissions de gaz à effet de serre. Il préconise un recours accru à l’endettement (de 10 points de PIB d’ici à 2030), couplé à un impôt exceptionnel sur le patrimoine financier des 10 % des contribuables les plus aisés, lequel rapporterait 5 milliards d’euros par an. Le patrimoine financier des ménages n’est en effet plus taxé depuis la suppression de l’impôt sur la fortune (ISF) en 2018, impôt recentré sur l’immobilier. Seuls les flux issus de ce patrimoine – revenus financiers, dividendes, plus values – sont imposés à 30 % via la « flat tax ».
La réponse de Bercy a été immédiate. « Est-ce que l’impôt est une solution ? Non ! », a tranché le ministre de l’économie Bruno Le Maire, mardi, sur RTL. Le ministre, qui s’est à nouveau fait le gardien de la stabilité fiscale, estime que le rapport présente l’outil fiscal « comme une option, pas comme une nécessité ». Il souligne que les contribuables potentiellement ciblés « paient déjà 75 % de l’impôt sur le revenu ». « Notre politique est de baisser les impôts, de baisser la pression fiscale dans un pays qui a la pression fiscale la plus élevée de tous les pays développés », a-t-il insisté, disant au contraire vouloir « rassurer les contribuables ».
Même son de cloche du côté d’Olivier Véran, le porte-parole du gouvernement, qui a écarté sur France Inter l’idée d’une nouvelle taxe déjà baptisée « ISF vert ». « Si une taxe suffisait à transformer notre pays et l’avenir de la planète, ce serait formidable. Mais je ne crois pas que ce soit vraiment l’enjeu », a-t-il expliqué mardi, se disant convaincu qu’« on peut y arriver sans » fiscalité.
« Pas d’obstacle philosophique »
Le ministre de la transition écologique Christophe Béchu s’est en revanche montré moins fermé. « La question d’un impôt, c’est un sujet qui ne peut pas être tabou, a-t-il affirmé sur FranceInfo. Tout le monde n’a pas le même bilan carbone (…). De la même manière qu’à l’échelle mondiale, il y a des dispositifs de solidarité qui consistent à demander aux pays du Nord de financer une partie de la transition, il est légitime que cette question puisse se poser dans la sphère nationale. » Une prise de position qui ne reflète pas la position du gouvernement, assure-t-on à Matignon : « Sur les propositions de financement [avancées par le rapport], Olivier Véran s’est exprimé ce matin au nom du gouvernement. »
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